Histoire de l’école
L'ingénieur à la fin du XIX ème siècle
Qu’est-ce qu’un ingénieur ? Pendant longtemps la qualification d’ingénieur fut réservée aux praticiens qui utilisent les mathématiques et les sciences appliquées dans une profession relevant de la mécanique, de la métallurgie, des mines, des travaux d’art, de la défense et de l’attaque des places, etc., puis de l’électricité. Mais quand l’application scientifique raisonnée se généralisa dans tous les domaines, l’usage s’établit d’appeler ingénieurs ceux qui utilisent les données des sciences les plus diverses dans les métiers les plus variés, ou encore qui conduisent leurs travaux selon la méthode dont Descartes est le véritable fondateur et que la terminologie moderne désigne sous le nom de méthode scientifique.
Au temps de mes débuts, nombre de chefs d’industrie, et non des moindres, étaient avant tout des marchands complètement imperméables à toute suggestion d’ordre technique et scientifique. Une anecdote authentique éclairera cette définition. Une entreprise avait une usine en province et un magasin de vente à Paris auquel l’usine livrait ses produits à un tarif d’ordre, immuable. Le comptoir de vente, lui, vendait à sa clientèle le mieux qu’il pouvait :
— Je ne sais ce que fait Y. (l’ingénieur), me dit un jour l’usinier, mon usine ne va pas du tout, elle me mange de l’argent. Heureusement que mon comptoir est bien conduit et en gagne !
— La balance générale, dis-je, est-elle mauvaise ?
— Non, le solde est bénéficiaire.
— Vous avez alors un sûr moyen de l’augmenter, fermez votre usine et ne gardez que votre comptoir …
La réponse n’est jamais venue.
Pour les industriels de cette espèce, il y avait deux groupes d’opérations d’usine : celles qui conduisent à des rentrées et celles qui conduisent à des débours.
De par cette vue sommaire, tout projet d’installation ou d’amélioration techniques était suspect et rejeté ou au moins ajourné ; on ne croyait pas au profit immédiat.
Si par aventure un ingénieur avait obtenu de faire une installation de cette nature, il s’entendait demander tous les jours si cela serait bientôt terminé, s’il croyait vraiment que « ça irait». Et si cela n’allait pas tout à fait bien au premier essai, si les factures n’augmentai ent pas dès le premier mois, le brave usinier, sincèrement inquiet, se demandait sérieusement s’il n’avait pas écouté un loufoque qui allait le ruiner. Les traitements des cadres techniques figuraient au bilan au poste des Dépenses improductives (chose vue) au même titre que le parterre fleuri à l’entrée de l’usine et la subvention inévitable à la société de gymnastique du lieu.
Sans doute, il fallait bien aussi payer les comptables et préposés aux factures, mais ceux-là, on comprenait ce qu’ils faisaient: n’était-ce pas eux qui préparaient et opéraient les rentrées de fonds grâce auxquelles l’usine « pouvait tourner» ? Et le jour où il y aurait à nommer un directeur, on le choisirait parmi eux et très exceptionnellement parmi les ingénieurs.
Ce fut l’un des aspects curieux et déplorables de ce XIXè siècle où se multipliaient les découvertes scientifiques applicables à l’industrie. Pendant que l’Amérique, l’Angleterre, l’Allemagne et tant d’autres nations rénovaient hardiment leur outillage et leurs méthodes, on s’attardait en France à considérer les ingénieurs comme un rouage de second ordre, leurs avis prévalaient rarement et nos usines, dans leur ensemble, conservaient leurs machines anachroniques retapées indéfiniment, avec leur organisation et leur comptabilité d’artisan de 1800.
La France, malgré la qualité de ses savants, de ses ingénieurs, de ses inventeurs et en dépit de brillantes exceptions, se faisait distancer honteusement par des peuples moins doués.
Ces temps ne sont plus, l’ingénieur n’est plus méconnu et souvent même le gérant d’entreprise est lui-même un ingénieur. D’ailleurs, nombre de ces anciens propriétaires, dont toute la science tenait dans la roublardise des marchés avantageux, ont voulu que leur successeur présomptif, fils ou gendre, ait fait des études d’ingénieur.
Effet d’une mode, désir d’orner leur raison sociale d’un titre de diplômé ? Peu importe, le fait est là. Nos usines sont mieux conduites et si l’industrie souffrait encore avant la guerre, cela tenait généralement à d’autres causes, notamment à une mauvaise politique économique et à l’esprit financier qui gagnait les conseils d’administration.
Sans prétendre traiter ici ce point important de la question, disons que le financier 100% perd de vue le but premier de l’industrie qui est de produire et mettre à la portée de la masse des hommes les choses nécessaires à la vie civilisée, en laissant aux entrepreneurs un profit raisonnable et légitime. Pour le dit financier, le profit produit par l’exploitation technique devient en quelque sorte accessoire. Faire jouer l’accordéon à la cote de ses actions en vue de ventes et d’achats en bourse alternés, constituer des trusts, ruiner un concurrent pour l’éliminer, acheter des puissances politiques, sont des opérations beaucoup plus fructueuses.
Et si d’aventure ces opérations tournent mal, on n’a pas à se désoler, car on a travaillé avec l’argent des autres. La rétribution aussi basse que possible du personnel est également un principe cher au financier intégral, qu’il applique surtout aux cadres, moins redoutés que les ouvriers.
Pour la résolution des problèmes sociaux, les ingénieurs, en tant que Corps, furent longtemps ignorés totalement, et pour la consultation et pour la conclusion d’accords. Lors des conflits de 1936, ils furent tenus pour inexistants par le gouvernement, par la masse ouvrière et par le patronat, ainsi du reste que tout le corps de maîtrise et tout le personnel administratif et commercial. Après cette crise ils obtinrent d’être pris en considération, mais il semble que c’est seulement à la suite de cette malheureuse guerre qui laisse l’industrie en un si misérable état que l’action des ingénieurs va être vraiment à même de se faire sentir.
L’évocation de temps disparus a eu peut-être quelque intérêt pour les vieux ingénieurs, mais mon but a surtout été de faire connaître aux jeunes l’atmosphère dans laquelle devaient opérer, entre 1850 et les abords de 1914, presque tous leurs prédécesseurs et en particulier l’ancien élève des Écoles Nationales d’Arts et Métiers.
Paul Popin (Chalon 1893) – Les Gadz’Arts – 1947
1803, Le Prytanée de Compiègne
Intégré au Prytanée français depuis 1800, le collège de Compiègne est transformé le 25 février 1803 en École des Arts et Métiers. L’École du Duc de La Rochefoucauld prend alors la dénomination utilisée depuis 200 ans. Inspiré par le Duc, le Premier Consul Bonaparte répond ainsi à la nécessité de doter la France d’une école dont la vocation est uniquement industrielle.
1805, Une École d'Arts et Métiers à Trèves ?
La Troisième École d’Arts et Métiers a failli être située à Trèves !…..Il s’en est fallu de peu.
Grâce aux recherches de Marcel Fels (Ch 28), l’histoire de cette École fantôme est enfin retracée.
En 1794, les troupes françaises occupent la Rhénanie, à la suite de leurs victoires sur les Autrichiens. Ces territoires sont organisés administrativement sur le modèle hexagonal, en treize départements ; Trèves devient le chef lieu du département de la Sarre et connait une période française de vingt années. La souveraineté française est reconnue par le traité de Lunéville (1801) et la paix d’ Amiens (1802). Les établissements religieux sont sécularisés: l’abbaye de Saint-Maximin, située à proximité de la ville de Trèves, utilisée par les troupes françaises de 1794 à 1801, est dissoute officiellement le 15 ventôse an X (4 mars 1802).
Premier consul
En 1799, le gouvernement décide du transfert de l’École installée dans le château du duc de La Rochefoucauld vers Compiègne, où elle rejoint d’autres collèges pour former le <<Prytanée français>>. Le premier consul visite l’établissement en 1800 et charge une commission de savants (Monge, Berthollet, Laplace…) de lui soumettre un projet de création de plusieurs écoles d’ Arts et Métiers. Par décret du du 6 ventôse an XI (25 février 1803), l’ établissement de Compiègne devient École d’Arts et Métiers, le duc de Liancourt étant désigné comme inspecteur général.
En 1804, dans la foulée, l’École de Beaupréau est décidée. Ouverte en 1811, elle y reste jusqu’à son transfert à Angers en 1815 (durant les cent-jours). Ainsi nait la <<deuxième École>>. Le transfert de l’ École de Compiègne à Châlons est réalisé le 13 décembre 1806: <<notre première École>> est enfin dans ses murs.
Alors que Compiègne n’est pas encore installée à Châlons, que Beaupréau n’est pas ouverte, Napoléon décide la création d’ une <<troisième École>>. Et un décret impérial du 28 floréal an XIII (18 mai 1805), signé à Milan par l’ Empereur lui-même (où il est parti se faire couronner), l’installe dans l’ abbaye de Saint-Maximin, pour recevoir 400 élèves.
L’installe…. c’est vite dit! Il y a tout d’abord des problèmes de financement. La ville de Trèves est chargée de couvrir les frais du premier établissement, mais les bâtiments abandonnés et dégradés supposent des dépenses très importante. Trois projets sont étudiés et chiffrés successivement durant huit années.
Suspendue
Il faut, par ailleurs, récupérer terrains et bâtiments utilisés par tel ou tel, ce qui est fait en 1808. Mais l’adjudication des travaux est suspendue; manque de crédit certes, mais aussi parce que l’École de Châlons – prise comme modèle -, étant encore en pleine réorganisation, il est préférable d’attendre les résultats des changements intervenus pour remettre en activité les travaux de Saint-Maximin. Il y a aussi une opposition à la survie de ce genre d’établissement technique. Toutefois, la volonté de Napoléon l’emporte et, le 22 août 1811, la procédure d’adjudication des travaux est reprise. Puis l’autorisation de commencer les travaux est donnée par le ministre, le 18 juin 1812, sur le deuxième projet. Le 14 juillet, nouvelle suspension des travaux pour tenir compte des suggestions du Duc. Le devis jugé trop élevé, nouvel arrêt des travaux en mai 1813. Enfin, le 29 octobre, le ministre approuve le troisième projet et les travaux sont menés activement … !
Fin 1813, l’Empire napoléonien est en pleine débâcle et les alliés envahissent le territoire national. Les Prussiens passent le Rhin le 1er janvier 1814 pour arriver à Paris le 21 mars. Napoléon abdique le 4 avril. La Rhénanie ayant été évacuée en mai-juin, on peut supposer que les travaux de l’École des Arts et Métiers de Saint-Maximin ont été arrêtés dès début 1814. Les traités de Paris de 1814 et 1815 donnent à la Prusse la Sarre et la plupart des territoires de la rive gauche du Rhin. Dès 1815, cette puissance installe une garnison d’infanterie à Trèves dans les locaux de l’ancienne abbaye de Saint-Maximin.
Ainsi, le grand projet de Napoléon de création d’un établissement à vocation technique s’est transformé en une nouvelle caserne pour son ennemi; et comme le conclut Marcel Fels, l’Empire avait travaillé pour le roi de Prusse !
D’après l’article de Jean Vuillemin (Pa 40) parue dans la revue Arts et Métiers Magazine de Mars 2001.
1851, l’École d'Arts et Métiers de Châlons-sur-Marne
Fondé en 1830 par Édouard Charton, ‘Le Magasin Pittoresque’ est un périodique dont les sujets traités sont les plus divers. En 1851, l’École d’Arts et Métiers de Châlons-sur-Marne est à l’honneur…
Les Écoles d'Arts et Métiers
Au delà de leur vocation originelle qui était de former d’habiles techniciens capables d’allier théorie et pratique, ‘les Écoles d’Arts & Métiers’ devaient aussi permettre aux classes les plus modestes d’élever leur condition. Sous la restauration, le Duc de La Rochefoucauld-Liancourt, fondateur et bienfaiteur de nos Écoles s’efforça de le démontrer à travers un éloquent mémoire destiné au monarque.
La Vie des Gadzarts sous Le Second Empire
Consacrant les nouvelles promotions 2002, les cérémonies des ‘Fignos’ ou encore de la ‘Sainte-Cécile’ viennent de se dérouler dans chaque Écoles d’Arts & Métiers. Point de rencontre entre différentes générations de Gadzarts, ces festivités permettent aux Anciens de partager leurs expériences avec les plus jeunes. Si aujourd’hui, vie professionnelle et souvenirs gadzarts sont évoqués ; à la fin du XIXème siècle, les ainés pouvaient en outre, témoigner de la rigueur de leur scolarité.
L’École d'Arts et Métiers d'Angers en 1897
“Tous les mouvements se font au son du tambour. Après l’étude du matin et le premier déjeuner, quelques instants de récréation (…). Qu’il nous soit permis ici d’émettre un vœu. A notre avis, les élèves de l’École d’Angers, et sans doute leurs camarades des autres écoles ne jouent pas assez. En dépit du travail manuel assez fatiguant auquel ils se livrent pendant six heures et demie par jour, on aimerait à ne pas les voir consacrer uniquement leurs trop rares récréations à des allées et venues.”.
Nous avons publié en Mars dernier un extrait du journal l’Illustration du 16 octobre 1897, voici de nouveaux extraits issus de l’Illustration du 9 octobre 1897, décrivant l’enseignement dispensé aux jeunes gadzarts de cette époque… Angers en 1897
Angers ... Octobre 1912, rentrée à l'Ecole des Arts
Il y a 90 ans, cinquante potaches franchissent le porche de l’école d’Angers. A l’aube du premier conflit mondial, la promotion Angers 1912 s’apprête à rejoindre la grande famille gadzarts…
Angers ... 1914-1918, Période Sombre
Tandis que le Tabagn’s d’Angers est réquisitionné à titre d’hôpital militaire, nombre de Gadz’Arts font le sacrifice de leur jeunesse, voire de leur vie …
Dessins d'élève aux Arts et Métiers
Le 1er août 1801 un arrêté ministériel définit le règlement général du ‘Prytanée Français’, l’école de Compiègne se distingue des autres Prytanées par la nature des enseignements qui y sont professés : “Les élèves destinés aux arts mécaniques seront divisés en deux ou trois classes ; ils continueront à apprendre (…) le calcul, le dessin sous le rapport des arts et métiers…”.
Octobre 1929, Incendie de la préfecture de la Marne
Un incendie à la préfecture de la Marne !
OCTOBRE 1929 : Les Gadzarts de Châlons assistent les pompiers
(reproductions de photographies conservées par la famille 93 – Châlons)
1934, Révolte sous les Cloîtres du Ronceray
Malgré les tentatives nombreuses et récurrentes à vouloir faire disparaitre les Traditions de nos Écoles, les élèves ont toujours su faire face aux menaces et autres répressions. Signe tangible de cette ténacité, les évènements qui se produisirent en 1934 à l’École d’Angers.
Dessins et gravures du Château de Liancourt au XVII/XVIII ème
Construit dans la première moitié du XVII ème siècle, le château de Liancourt se distinguait par le raffinement de ses parterres et autres pièces d’eaux. Épargné des destructions de la période révolutionnaire, les élèves de la Ferme de La Montagne investissent ces lieux à partir de 1795.
Les Fignos dans les années 30 à Châlons-sur-Marne
Le mois de décembre coïncide aujourd’hui avec la cérémonie des FIGNOS célébrée dans les différents Tabagn’s. Il y a 70 ans ces festivités se déroulaient au mois de Janvier. Comme le montre le cliché ci-dessus, l’uniforme n’était pas encore réapparu mais la solennité des orateurs n’en souffrait guère.
Le Patrimoine Gadzarique aux Archives Nationales
Signe tangible d’une grande richesse historique, les Archives Nationales conservent de nombreux documents relatifs aux Écoles d’Arts et Métiers. Afin de vous permettre d’en apprécier l’importance vous trouverez ici un extrait de l’État Général des Fonds, et à titre d’illustration quelques reproductions de documents originaux.
Brève Iconographie du Duc de la Rochefoucauld
Projet d'arrêtés sur l'organisation d'une École à Compiègne
Projet d’Arrêté Concernant l’Organisation d’une École d’arts à Compiègne.
685. SECTION de l’intérieur. C.en Miot, Rapporteur. 2ème Rédaction.
Le Gouvernement de la République, sur le rapport du ministre de l’intérieur, arrête ce qui suit:
- TITRE I. Dispositions générales.
- TITRE II. Organisation de l’École.
- TITRE III. De la formation des Élèves en Compagnies.
- TITRE IV. Des Approvisionnements.
- TITRE V. Comptabilité.
693. SECTION de l’intérieur. C.en Miot, Rapporteur. 3ème Rédaction.
Le Gouvernement de la République, sur le rapport du ministre de l’intérieur, arrête ce qui suit:
- TITRE I. Dispositions générales.
- TITRE II. Organisation de l’École.
- TITRE III. Des Élèves.
- TITRE IV. Des Approvisionnements.
- TITRE V. Comptabilité.
A PARIS, DE L’IMPRIMERIE DE LA RÉPUBLIQUE. 1er Ventôse an XI
Souvenirs de la Cluny 123-126
Découvrons quelques clichés de Cluny datant des années 1923 à 1926.
Les Fignos de 1907 à Châlons-sur-Marne
Découvrons quelques clichés des Fignos à Châlons. Alfred Metton a décrit ces instants si singuliers dans la vie des Gadz…
“Cette fête se passait en cercle strictement fermé, dans une cour de l’École, à grand renfort de musique instrumentale et de chœurs exécutés avec une farouche énergie, les anciens défilant d’abord avec importance devant les conscrits, rangés sur 2 rangs face à face, dans la position du garde à vous, après s’être comiquement accoutrés, jugulaire entre les dents, au commandement militaire d’un ‘Général au Fignos’. Cette revue d’un nouveau genre terminée, des groupes se formaient par région d’origine. Les ‘moutons’ (champenois), les crochus (normands), etc., rejoignaient les emplacements qui leurs étaient assignés.
Un conscrit, désigné dans chaque ‘bande’, devait offrir à ses camarades la primeur d’un discours écrit d’avance, par ses soins, et dont le sujet réglementaire était les particularités locales de sa région. Au gré de la fantaisie des auteurs, ce panégyrique du pays natal, pris plus ou moins au sérieux, faisait parfois ressortir des considérations inattendues. Pour occuper le plus grand nombre des conscrits pendant cette audition, les anciens facétieux, assignaient à leurs jeunes camarades toutes sortes d’occupations accessoires. Pendant que le discoureur parlait, un autre, passait les bras sous les siens, faisait les gestes à sa place; un troisième buvait de temps en temps une gorgée d’eau dans le but évidemment hypothétique de calmer la soif du conférencier; un 4e s’épongeait le front; d’autres avaient encore des rôles commandés par avance, qu’ils remplissaient sous l’œil conventionnellement impassible des anciens. La glace se fondait avec la dernière phrase du discours, et l’heure du repas du midi, où la fête se terminait, il n’y avait plus ni anciens, ni conscrits, mais seulement d’excellents amis ayant trouvé l’occasion d’accuser d’une façon originale leur esprit de corps et cet indestructible sentiment de solidarité.”
Alfred Metton ‘Les Gadzarts, Les Ingénieur des Arts et Métiers – Paris – 1925’
L’École Nationale d'Arts et Métiers vue par une écolière
L’École Nationale d’Arts et Métiers vue par une écolière de Châlons sur Marne.
J’ai eu l’occasion d’assister à une coulée de fonte à l’école Nationale des Arts et Métiers de Châlons sur Marne.
Dans un grand cubilot la fonte est en fusion. Un ouvrier appuie une longue barre de fer: un ringard, sur la fonte durcie accumulée dans le trou par lequel la fonte liquide doit sortir, c’est la carotte. Un autre avec un gros marteau tape sur le ringard. Après une dizaine de coups un troisième ouvrier vient remplacer celui qui tapait. Au bout de deux ou trois manèges comme celui-ci la carotte cède. On aperçoit par le trou un filet lumineux qui arrive : c’est la fonte. Ce métal fondu à 1300° grossit et glisse dans la rigole, sorte de tuyau non recouvert, et coule dans la grande poche d’acier garnie de terre réfractaire et suspendue à un pont roulant. Cette rivière de feu s’épaissit de plus en plus. Dans l’atelier où règne une grande chaleur les ouvriers ont le visage rouge et ruisselant. Le ruisseau de fonte s’amincit encore, encore, et … plus rien ne coule. Un ouvrier rebouche le trou pendant que celui qui manœuvre le pont roulant, dirige la poche plaine de fonte vers les moules qui doivent recevoir le métal.
Jeannie-Claude Bonnetain (11 ans)
Carte de sociétaire (1947)
Extraits de la correspondance du Duc de la Rochefoucauld
LE DOSSIER DU MOIS : LETTRES POUR UNE ÉCOLE
Je désire avec force qu’une idée aussi grande, aussi faite pour être nationalement utile, que celle qu’a eue l’Empereur en instituant l’école de Châlons, soit conduite sûrement à toute la perfection que je crois que l’on a droit d’en attendre” écrit le duc de la Rochefoucauld Liancourt lors de l’établissement de l’École des Arts et Métiers à Châlons-sur-Marne.
Pour y parvenir, il s’efforçait de préserver l’École de tout ce qui pouvait altérer son image et veillait à son fonctionnement dans les moindres détails.
L’École est dirigée par un programme d’ensemble conçu et supervisé par lui : organisation administrative et pédagogique, problèmes d’intendance, vie des élèves… rien n’échappe à sa scrupuleuse attention.
Les élèves sont alors très jeunes, souvent orphelins, issus de familles très pauvres, ils donnent beaucoup de souci à leur protecteur. Pour obtenir avis et décisions, pour faire accepter ses propositions, le duc écrivait souvent, parfois journellement, au ministre de l’intérieur : Chaptal puis Champagny. Il adressait aussi de nombreux plis à M. Labatte, directeur ou à M.Molard, directeur des travaux. Quatre Gadz’arts de la promotion 1989, ont parcouru les doubles de ces correspondances, datées de 1806 à 1808, conservées à la Bibliothèque Municipale de Châlons ; en hommage au créateur de l’École des Arts et Métiers, ils ont rassemblé dans un ouvrage quelques extraits évocateurs des années de naissance d’une grande école d’aujourd’hui.
Extraits de la correspondance du Duc de La Rochefoucauld (Présentation)
En 1991, K’spar*, Helimax*, Zepi* et Zagato* de la Ch189 ont réalisé une brochure rassemblant quelques extraits du manuscrit 1422 conservé à la Bibliothèque Municipale de Châlons-sur-Marne.
Il s’agit d’un volume relié de 562 pages contenant la copie des lettres expédiées par le Duc de la Rochefoucauld-Liancourt entre le 29 juin 1806 et le 13 septembre 1808.
- Alain DILLENSCHNEIDER dit K’SPAR
- Alain HECKLY dit HELIMAX
- Joseph KOENIG dit ZEPI
- Raphaël WITTMANN dit ZAGATO
EXTRAITS
Cluny 167-171, une promotion fantôme
En 1967, un vent de rébellion souffle sur Cluny.
C’est alors que le ministère annonce la fermeture de l’établissement.
La contre-offensive s’organise . . .
Après une année de troubles, les élèves sont finalement de retour à Cluny. Une cérémonie est organisée le 10 mars en l’honneur de la promotion Cl.67. Un équivalent de monôme de baptême, guidé par le major de la Cl.66, descend du farinier avant de défiler dans les rues de la ville.
En ce milieu des années 60, la vie s’écoule paisiblement au bord de la Grosne, petite rivière qui traverse Clun’s. La célèbre abbaye dépasse le millier d’années -elle a été fondée en 910- et des élèves sont dans la place depuis 1866. En effet, Victor Duruy créa le 1/11/1866, une École Normale Spéciale qui formait des professeurs et qui devint, d’abord, École nationale d’ouvriers et contremaitres en 1891 avant d’être École des Arts et Métiers en 1901. On pense déjà à fêter le centenaire de l’École !
Mais on murmure, on s’ agite…. Quelques jours après le baptême de la Cl64, la presse relate des incidents au Centre de Cluny. Quelques élèves, militants syndicaux, se rebellent contre la domination des anciens. La promotion 63-67 adresse divers courriers et pétitions au ministère. Les relations entre certains professeurs et élèves se tendent: la 2 CV d’un professeur de Mathématiques est retrouvée, une nuit de janvier 1967, au milieu de la cour du cloître. Outre cette délocalisation, elle n’aura, en fait subi aucun dommage. Un seul élève sera identifié ! En juin, des élèves déclenchent une grève des cours pour protester contre les notations jugées trop sévères et les compétences professionnelles de certains professeurs. Quelques enseignants(12/32, selon Jean Michaud Cl22 (-Directeur de Cluny du moment-) à leur tour débrayent….
Deux générations de professeurs s’opposent: les plus anciens, ayant souvent exercé le métier d’ingénieurs avant d’opter pour l’enseignement, les plus jeunes fraîchement sortis de l’École normale supérieure de l’enseignement technique (Enset). Le journal “Le Monde”, prend fait et cause pour le corps professoral (<<dont l’accablement est évident et sincère”>> ..sic..) et évoque l’isolement dans cette ville de 4500 habitants et indique qu’au Ministère de l’ Éducation nationale <<on s’interroge sur l’opportunité de laisser d’y laisser une école d’ingénieurs>> !
Parallèlement, la direction de l’Enseignement supérieur souhaite intégrer l’enseignement technique à l’université. Une évolution qui entraînerait la fermeture des centres situées hors des villes universitaires (Cluny, Chalons).
Le couperet du Ministère tombe !
En juillet, lors d’une réunion des directeurs de centres à Paris, Jean Michaud apprendra qu’aucune promotion n’entrera à Cluny en septembre 1967. Aucune explication ou document officiel étaieront cette mesure. Les 85 élèves reçus à Cluny seront répartis dans les centre d’Aix, Angers ou Châlons. La <<Cl.67>> est morte avant d’ être née!
La réaction ne se fait pas attendre. Le président du Groupe de Lyon, Victor Mermet (Cl.25) émet alors l’idée de créer la Société des Amis de l’École de Cluny (SAEC). Elle voit le jour en août 1967 et s’attache alors à rétablir la vérité sur ce qui est dit et écrit sur le centre de Cluny. Marc Fontaine, professeur polyvalent à l’École (Physique, Chimie, Mathématiques…), en accepte la présidence le 22 août 1967. L’efficacité des actions de “FonFon” et de tous, fédératrices auprès de toutes les personnalités civiles et politiques, régionales et nationales, les relations avec l’industrie et les universités locales sont déterminantes. Fin 1967, la SAEC compte 1850 membres et 92 adhésions de sociétés dont la Soce. Un bulletin trimestriel de liaison est édité. (Et à ce jour, la SAEC vit toujours!)
De son côté, le Maire de Cluny adresse une protestation à l’Éducation Nationale ainsi qu’aux élus et préfet de Mâcon. Les commerçants de Cluny s’associent immédiatement à cette protestation. Mi-octobre le conseil général de Saône et Loire s’oppose officiellement à la fermeture du centre de Cluny.
En juin 1968, c’est le revirement !
Le maire de Cluny est reçu au ministère de l’Éducation Nationale et il lui est précisé que le centre de Cluny ne fermera pas et que les élèves de première année entreront bien à Cluny en septembre 1968. Les pouvoirs publics ne souhaitent pas, semble-t-il, rajouter un sujet de tension aux évènements de Mai. Durant cette période troublée, et pour raison d’intendance, les cours n’ont été suspendus que 15 jours.
Le 3 octobre 1968, 102 élèves intégreront Cluny !
Le centenaire de l’École se déroulera donc que le 12 octobre 1968, en présence de MM Philippe Malot (secrétaire d’État à la Fonction publique) et Jacques Trorial (secrétaire d’État à l’Éducation nationale) et de près d’un millier de personnes.
Pour les élèves, l’absence de la promotion Cl.67 a tellement suscité d’incompréhensions qu’ils firent leur maximum pour organiser fêtes et manifestations diverses. Un immense repas se déroulera dans la grande Gal’s.
Cette tache dans l’histoire de notre école ne fit que contribuer à souder encore plus les promotions.
Et l’histoire de la Cl167 ne s’arrête pas là car s’est posé le problème du parrainage de la Cl192. Sous l’impulsion de Cyran’s Ch167-Cl168, revenu à Clun’s faire sa 2ème année, le parrainage a été assuré par une partie des promos Cl160 à Cl169. La réussite fût totale : il y eût autant de parrains que de conscrits ! ! ! !
D’après l’article d‘Alain Millot (Ai.67) paru dans Arts et Métiers Magazine d’avril 2013 et avec le concours de L’AHCLAM.
L’École Nationale d'Arts et Métiers de Metz
Dernier né des centres ENSAM, l’École d’Arts et Métiers de Metz a ouvert ses portes en 1997. Peu cité jusqu’alors sur patrimoine.gadz.org, nous vous invitons à sa découverte par une petite visite, grâce aux clichés de Willing 86 Me198.
Un Tabagn's en Allemagne
En partenariat avec le centre ENSAM de Metz, l’université de Karlsruhe propose un cursus intégré franco-allemand. Pour compléter notre visite de Cibers (Février 2002) voici Kanak avec sa cours d’honn’s, son amphi géant, …
Une École Arts et Métiers en Allemagne
Karlsruhe est une ville relativement grande de 200 000 habitants qui se trouvent dans le Baden-Würtenberg à 60 km de Strasbourg et 15km de la frontière française. Elle est réputée pour son château et le Bundesverfassungsgericht (haute cours de justice). La fac de Karlsruhe qui est axée sur l’enseignement technologique possède des bâtiments qui retracent les différentes périodes architecturales depuis sa création. Elle abrite aujourd’hui 20 000 étudiants.